1979.
Le retour en force de Zappa, perdu un temps dans les querelles
juridiques. Déjà, « New York » et «
Studio Tan » annonçaient cette vigueur nouvelle. Zappa est
arrivé à pleine maturité et peut se passer
désormais de faire le clown pour les teenagers. Due à
Warner bros avant de pouvoir enregistrer chez Mercury, cette nouvelle
bande est loin, une nouvelle fois, d’être un «fond de
tiroir», C’est un disque exigeant, rigoureux, qui pour beaucoup
ne se laissera approcher qu’après plusieurs écoutes. Loin
de manifester un relâchement dans l’écriture, le renouveau
de Zappa se traduit par un sérieux avoué. A ceux qui ne
savent qu’être bavards à chacun de leurs trop nombreux
disques, Zappa oppose la maîtrise fulgurante de ses apparitions.
D’emblée, cet album s’annonce comme l’un des plus réussis
de toute sa production.
« Filthy Habits» ouvre en beauté la face 1, morceau
très luxuriant dont l’ouverture classico contemporaine glisse
vers la musique de King Crimson (« In The Court,,, »),
voire de Black Sabbath (« Paranoid ») si l’espace d’un
instant, introduisant ainsi un splendide solo de guitare composé
de deux parties; la première est une reprise de
«Transylvania Boogie», la seconde est
exécutée dans le style de l’époque « Zoot
Allures», sombrant enfin parmi des bruitages électroniques
qu’on n’avait pas vu si intelligemment employés depuis un
certain « Electric Ladvland ».
« Flambay», aux faux airs de musak et de piano-bar jazzy,
nous gratifie dans sa deuxième partie de thèmes
désarticulés de tango et de «jigs»
irlandaises, avant « Regyptian Strut », pièce
manifestement écrite dans l’esprit d’une musique de film, La
face 2 s’ouvre avec un « Time ls Money » aux confins de la
musique dodécaphonique, prouvant par là que,
contrairement à ce qu’en disait Maurizio Kagel, on peut
très bien marier musique populaire et musique savante. «
Sleep Dirt » est une habile parodie d’un certain «
René’s Theme » qui avait scellé naguère la
rencontre Coryell/McLaughlin (« Spaces »), tandis que
« The Ocean Is The Ultimate Solution », longue suite
jazz-rock, nous porte avec élégance et ironie vers les
rivages du Mahavishnu Orchestra, Terry Bozzio y assurant une rythmique
de ter à la Cobham, Beaucoup de jazz-rock donc dans un album
purement instrumental que rien n’empêche de considérer, en
attendant, comme une sorte de « Hot Rats » n° 3. A
suivre.
Composition présumée et non exhaustive du groupe F. Zappa
(lead guitare ; Patrick O’Hearn (basse) ; Tomy Mars (claviers) T.
Bozzio (batterie) Ed Mann (vibraphone et percussions). Toutes
références dans « Erudit ».FRANCIS VINCENT.
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