1966. Enregistré sur un magnétophone 4 pistes, ce disque est déjà une performance technique. C’est aussi le seul double LP notoire de époque avec le « Blonde On Blonde » de Dylan, le premier à utiliser de longues compositions occupant toute une face, et dont la conception musicale (effets électroniques, mélange de musiques populaires et d’orchestrations classiques) mettra plus d’un an à être tolérée, puis acceptée commercialement (« Sgt. Pepper » des Beatles). Sans potentiel commercial, « Freak Dut » troublera tout de même notablement les esprits: que ce soit dans « Return 0f The Son 0f Monster Magnet», hommage à Edgar Varèse où les bribes de phrases, onomatopées, cris, plaintes font écho à la sirène et au piano préparé, se désintégrant finalement dans les voix sur-aiguès et accélérées de quelque personnage de dessin animé, ou encore dans « Help ‘m A Rock » (repris plus tard par le groupe psychédélique West Coast Pop Experimental Band), happening musical digne des meilleurs moments du Living Theatre, avec son cortège d’interpellations, de cris, d’orgasmes et d’insultes aux flics. Mais « Freak Out » est aussi avant tout un commentaire social sur l’Amérique des Sixties, sur les matraquages radiophoniques (« Brain Police »), les amourettes des teenagers (« Go Cry On Somebody Else »), ou encore les émeutes raciales de Watts en 65 (« Trouble Every Day»). Violence, critique de l’environnement moderne, outrances verbales et nostalgies musicales, théâtre de l’absurde et absurdité de l’American Way of Life, psychodrame de la décomposition culturelle: tel apparaît « Freak Out » dans la niaiserie et la grisaille de la production musicale ambiante. - FRANCIS VINCENT.
|